BIOGRAPHIE D'André Van Lysebeth

Jeune homme des années trente, André Van Lysebeth découvrit le yoga au coeur de son intérêt pour l'hypnose et l'exploration intérieure. « C'est l'hypnose qui m'a très tôt, à la fin de mon adolescence, fait découvrir les immenses potentialités du psychisme humain, d'autant que dans les livres dénichés chez mon bouquiniste, je trouvais les indications extraordinaires de l'hypnose et de la suggestion. Or, quand moi-même j'allais chez le dentiste, moi j'avais mal ! Il y avait là une anomalie et c'est elle qui me conduirait plus tard au yoga, en passant par la méditation en laquelle je voyais seulement une technique d'auto-hypnose, ce en quoi je me trompais et je m’en suis vite aperçu. » André Van Lysebeth rencontra un premier yogi-fakir à Bruxelles au seuil des années cinquante. Ils travaillèrent ensemble. Entre-temps il avait étudié systématiquement les nombreux ouvrages de Swami Shivanada. A la demande de diverses personnes, il commença à partager et transmettre l’expérience du yoga.



Écoutons-le :
« Un jour, je reçois un coup de fil d'un dénommé Julien Tondriau. un expert agréé par le Musée du Cinquantenaire à Bruxelles, où il est attaché à la section « Antiquités tibétaines », ce qui lui donne des introductions dans des milieux assez divers. Il a entendu parler de moi et propose de faire ensemble des tournées de causeries sur le yoga; où il assurerait l'exposé que j'illustrerais par des âsanas, alors encore peu connus en Occident. Nous sommes vers 1950-52. (...) Je me souviens d'une conférence mémorable donnée à la « Maison des Ingénieurs » dans une partie historique de Bruxelles, le Ravenstein. La salle de conférences fut bientôt envahie par le public, au point que les spectateurs se pressaient et touchaient la grande table sur laquelle j'avais à exécuter mes âsanas. Comme seuls les premiers rangs auraient une chance de voir quoi que ce soit, on a décidé de mettre une seconde table sur la première, ce qui fait que je dominais toute l'assemblée. La causerie eut beaucoup de succès et aura des prolongements ci-dessous.


Julien Tondriau me téléphone peu de semaines plus tard en me disant que la télévision belge (elle venait de débuter) voulait diffuser une émission sur le yoga. Il me demande si j'accepte « Pourquoi pas ? » Et c'est ainsi que nous avons sommes tous deux convoqués un vendredi soir Place du Sablon, dans un café - lieu insolite -, pour y rencontrer la présentatrice, France Hardy (rien de commun avec Françoise Hardy), qui devait présenter l'émission programmée pour le lendemain, samedi. Nous arrivons vers 19 heures dans ce café enfumé plus les relents de bière où tous les présentateurs et réalisateurs d'alors se réunissaient dans une ambiance très St Germain-des-Prés. On me présente Madame France Hardy, qui demande d'emblée : « Qu'avez-vous préparé ? » Tondriau lui demande : » Pardon ! Qu'avez-vous préparé ? » Rien. Chacun avait compté sur l'autre partie pour préparer le programme. Mais la présentatrice ne se laisse pas démonter pour autant. L'émission ne passe qu'à dix-sept heures, venez donc, me dit-elle, au studio de la place Flagey à quatorze heures, ainsi nous aurons tout le temps de préparer l'interview. » Entre-temps, nous discutons un peu « yoga » et me dit qu'elle souhaite surtout des choses visuelles, donc des âsanas, mais elle semble personnellement vraiment intéressée par cette chose encore mystérieuse qu'était le yoga en ce temps-là, déjà bien lointain !

A cette époque, tout passe encore en direct, donc on travaille sans filet et je n'ai aucune expérience en matière de télévision. Je me mets sur la tête, noue les jambes en lotus. « Silence ! on est sur antenne », dit un gars derrière la caméra... » et c'est parti ! Comme convenu, je redescends au sol et me retrouve en lotus devant France, qui d'emblée me pose sa première question. Elle et moi oublions la caméra et une question amenant la suivante, l'interview passe comme un éclair. Tout est O.K. avec les félicitations du réalisateur. En effet, pour France et moi ce fut seulement une conversation intéressante, spontanée et naturelle. Cela passa très bien à l'écran. Puis, surpris, je vois deux infirmiers amenant une civière. « Pourquoi une civière ? » dis-je. « Pour vous amener après le yoga ». Explication : des mois auparavant ils avaient reçu un certain Joe Clemendore, surnommé « le yogi des Caraïbes » qui avait, paraît-il, fait des contorsions extraordinaires préparées par un jeûne de trois jours. Après sa démonstration, il était épuisé au point qu'on avait d'urgence dû trouver une civière pour l'évacuer. Ils sont tout étonnés de me voir repartir seul, à pied, sans être épuisé ni effondré.

Cette émission eut des répercussions dont je ne mesurerai guère l’importance. »

Les premières méditations systématiques d’André Van Lysebeth appliquaient le schéma proposé par le Swami de Chidambaram, tel que Yeats Brown l'expose dans « The Lancer at large ». S'en suivit l'initiation aux exercices posturaux; ce, essentiellement selon l'enseignement de Swami Shivanada de Rishikesh (fidèle à l’Ashtanga Yoga de Patanjali).

André Van Lysebeth donna ses premiers cours de yoga à Bruxelles.

« Le hatha yogi Srikantha Rao avait donc quitté la Belgique pour les U.S.A. où la richissime fille du roi du tabac était devenue son élève et lui signait de généreux chèques en dollars. Quant à moi, je continuais à assurer mes cours à l'institut de beauté et la princesse Louise d'Arenberg y venait régulièrement. Puis elle elle m'invita à l'accompagner lors de son prochain voyage en Inde. Le programme était alléchant à souhait : d'abord un peu de tourisme en Inde, puis "destination Rishikesh". »

Il rencontra Swami Shivananda en avril 1963. Les deux hommes se reconnurent. Le maître - infatigable propagateur du yoga - aperçut les talents du disciple. Il l'incita à démarrer un revue : « Andrew, you must start a magazine». La revue « Yoga » vit le jour dès le mois de juin. Swami Shivanada mourut en juillet. Référence de nombre d'enseignants de par le monde, le périodique affiche aujourd'hui le n° 285. André Van Lysebeth en est le principal rédacteur. Il n'est pas inutile de préciser qu'en plus de trente ans, la revue n'a jamais eu recours à la moindre recette publicitaire.

Vers 1960, André Van Lysebeth ouvrit une école et fut à l'origine - avec Pierre Brel (frère de Jacques) - de la Fédération belge de Yoga (instituée en 1964). Ami de Gérard Blitz, il participa aussi à la coordination des diverses formations européennes d'enseignants; base de l'Union Européenne qu'ils créèrent ensemble. Plusieurs milliers d’enseignants de yoga sont diplômés de son école. En 1969, il fut la cheville ouvrière d'un premier Colloque International au Palais des Congrès de Bruxelles auquel participèrent mille cinq cents délégués venus du monde en entier ( de l'Inde, en particulier).

Plusieurs séjours en Inde et l'invitation de nombreux yogis en Europe, complétèrent ses sources. Ainsi, les Swamis Chidananda, Satcitananda, Gitananda, Dhirendra Bramachari, Yogiraj Bua, Dayananda; Nil Hahoutoff, et bien d'autres furent accueillis à maintes reprises à l’Integral Yoga Institute de Bruxelles. Il reçut aussi Swami Satyananda lors de stages d'été.

En 1967, il publia un premier ouvrage (« J'apprends le Yoga »). Suivirent « Je perfectionne mon Yoga », « Pranayama », « Ma Séance » et « Tantra; le culte de la féminité» (en 1988). Ses ouvrages sont devenus de grands classiques. Certains sont traduits en une dizaine de langues.